– Ca n’a pas l’air d’aller…
– Non. J’ai perdu mon identité.
– Vraiment? Où donc ?
– Un soir entre Paris et Beyrouth.
– Comment as-tu fait pour la perdre?
– J’ai été distraite, je regardais ailleurs.
– Pourrais-tu l’identifier si tu la retrouvais ?
– Difficilement.
– Même si je t’en montrais plusieurs…?
– J’ai toujours eu du mal à la reconnaître.
– Changeait-elle d’apparence?
– Elle devait s’adapter.
– C’était une séductrice?
– Non, juste une survivante.
– Alors tu ne devrais pas t’en faire pour elle.
– Pour elle, je ne m’en fais pas. Elle est suffisamment forte pour exister par elle-même.
– Tu as donc peur pour toi?
– Elle a quelque chose qui m’appartient.
– Quelle est cette chose?
– Un livre, plein d’images et de rires d’enfants.
– Ce livre est introuvable ?
– Il n’existe nulle part.
– Tu as bien cherché?
– Il n’existe qu’en un seul exemplaire.
– Tu as questionné ton entourage à son sujet ?
– Oui, mais ses réponses sont biaisées.
– Pour quelle raison ?
– Ils ont tous le même livre, la couverture est la même mais le texte diffère. Il est traduit. Son souffle n’est pas le même.
– Tu es donc à la recherche de ce souffle ?
– Oui. Je crois qu’en l’invoquant haut et fort, en implorant les montagnes, il se manifestera.
– Pourquoi ne pas simplement réécrire le livre?
– Parce que je l’écrirais avec mon coeur et mes yeux d’adulte.
– Parce que tu as aussi perdu ton coeur et tes yeux d’enfant?
– Non, mais je n’ai pas le souffle.
– As-tu espoir que les vents tournent?
– J’ai espoir qu’il vienne à moi.
– Il est peut-être déjà venu.
– Je l’ai cru un temps. Je me suis trompée.
– Que s’est-il passé?
– J’ai rencontré un homme riche. De plusieurs identités.
– Il a retrouvé la tienne ?
– C’est ce que je croyais. Jusqu’à ce que je réalise que j’étais moi-même incapable de la reconnaître.
– Il possédait peut-être ton livre ?
– Non, juste une pâle copie. Son souffle m’a pourtant chatouillé le ventre.
– C’était peut-être le tien…
– Il m’était familier. Mais ce n’était pas le mien.
– Comment le reconnaîtras-tu lorsqu’il viendra à toi ?
– Je le reconnaîtrai lorsque je ne serai plus essoufflée.
© Mia Sfeir
Les 3 étapes de la recherche identitaire :
Moi je sais où elle est ton identité
Sur la Côte d’Emeraude, bien sûr!
Comment tu as deviné ?
Magnifique! Tellement vrai!
Allo Londres, ici Paris. Merci très chère Mia A pour ta fidélité !
Tu peux me trouver la mienne aussi stp?
Le jour où je ne serai plus essoufflée, oui. Parce que pour le moment, je suis prise entre des vents contraires. Mais la route est belle.